Véritable petit bijou architectural, cette villa en bois Tom Wood se niche dans un écrin de verdure ucclois, à deux pas de l’effervescence urbaine. Le propriétaire, un passionné de décoration sillonnant le monde à la recherche d’objets inédits, signe là sa cinquième « maison-création ». Un régal !
Certaines artères bruxelloises fréquentées dissimulent, à l’abri des regards indiscrets, de jolis quartiers au calme insoupçonné. C’est dans un de ceux-là que Monsieur D. a décidé d’acquérir un terrain pour y bâtir sa dernière maison (une véritable aubaine dans la capitale où les terrains sont quasiment inexistants).
Le propriétaire n’en était pas à son coup d’essai. Après avoir rénové d’imposantes maisons de style – toujours à Bruxelles – rasé un bâtiment pour le transformer en loft, il avait le désir de construire neuf. «Non seulement pour donner vie à un projet contemporain – une première pour moi – mais également pour oser ce que je n’avais pas eu l’audace de réaliser par le passé.»
« Créer des lieux chaleureux qui ont une âme »
Le maître d’ouvrage, un ancien notaire, est animé d’une passion dévorante, celle de la décoration. Un engouement qui le pousse à s’éveiller à l’aube pour aller chiner dans les marchés aux puces les plus réputés, à se rendre chez les démolisseurs pour y « sauver » une pièce qu’il customisera, ou encore à voyager aux quatre coins de la planète à la recherche d’objets exclusifs ou d’œuvres d’art. «J’aime aménager les espaces pour y créer une atmosphère chaleureuse, qui ait une âme.» Et c’est plutôt réussi : chaque objet semble raconter une histoire. Comme cet éléphant de Birmanie exposé sous verre, ces spots de magasin transformés en luminaires vintage, ces sièges de parachutiste au design étonnant, ou encore cette statue chinoise faisant face à un tapis iranien…
Comme tout artiste qui se respecte, le maître des lieux aime vendre ses «œuvres» (entendez par là ses maisons meublées) une fois qu’il les a achevées. A l’heure de l’interview, il venait d’emménager la veille dans son nouvel antre. «Mais je pourrais très bien le revendre dans un an, sourit-il. J’ai d’ailleurs déjà acquis un autre bien, pour un nouveau projet…» Certains objets le suivent toutefois partout. «J’aime beaucoup les œuvres art, et je ne peux me séparer de certaines d’entre elles. Pourtant, je n’apprécie pas les intérieurs surchargés. Raison pour laquelle j’ai aménagé une cave dans la maison, que j’ai transformée en galerie d’art. Cela me permet d’exposer mes œuvres en alternance dans le salon, sans pour autant l’alourdir.»
Le propriétaire avait le souhait de construire contemporain, dans un matériau qu’il n’avait encore jamais testé : le bois. «Celui-ci offre un sentiment de chaleur, de nature, d’intimité, de retour aux sources… En ce qui me concerne, j’ai l’impression de me sentir vraiment chez moi dans une maison en bois. Mais c’est avant tout une question de ressenti.» Pour encore accentuer l’aspect cosy, le maître des lieux a opté pour des shutters, entendez par là des volets intérieurs en bois dosant la lumière sur mesure (on peut aussi les ouvrir complètement pour dégager les fenêtres). Cet aménagement signe la personnalité de la maison, tamisant l’ambiance tout en affirmant son caractère.
L’espace principal abrite la cuisine d’un côté, le salon de l’autre, tandis que la salle à manger assure la liaison entre ces deux volumes (ceux-ci étant séparés par un mur semi-ouvert intégrant le feu ouvert).
Dans la cuisine, plusieurs pièces uniques coexistent, comme un atelier de camion militaire allemand (servant de buffet), une table de boucherie (utilisée comme table à manger), ou encore une porte coulissante en bois du 17ème siècle dénichée à La Rochelle. Dans le salon, les curiosités se multiplient encore avec une table basse récupérée dans une usine textile nivelloise, une cheminée réalisée à partir de deux manteaux différents (provenant de Malines pour l’un et d’Angleterre pour l’autre). Un peu plus loin, un morceau de grue fait office de support d’œuvre d’art. Enfin, les luminaires de type industriel habillent l’ensemble de la demeure, au rez-de-chaussée comme à l’étage.
Vivant seul, le propriétaire n’avait pas besoin d’installer plusieurs chambres ou salles de bains. Le résultat offre des espaces aérés, véritables respirations à travers la bâtisse. Le hall de nuit en constitue une parfaite illustration : accueillant un placard de caractère (servant de dressing) et quelques œuvres d’art, il existe surtout pour le plaisir des yeux.
Chinés au marché aux puces de Waterloo, trois volets en bois ont été repeints et installés en divers lieux de la maison. L’un orne la façade avant «pour la touche d’authenticité», tandis que le deuxième sert de tête de lit, et que le troisième garnit le placard de la chambre.
La salle d’eau, séparée de la chambre par une porte indienne en teck, a également de quoi surprendre, surtout lorsqu’on lève les yeux. En effet, le plafond a été conçu avec des cannes à pêche serrées les unes contre les autres. «J’ai toujours aimé les cannes à pêche, car je considère qu’il s’agit de beaux objets. Cette idée de les coller m’est venue en admirant des plafonds de bambou, au Maroc. Je trouvais le résultat très chaleureux. Cette création s’inscrit dans le même esprit.» La salle d’eau se distingue aussi par ses revêtements muraux (y compris dans la douche) en mortex turquoise.
Vue de l’extérieur, la maison s’articule autour de deux « boîtes » en cèdre aux contours minimalistes. Le cube supérieur, aux lambris horizontaux, tranche avec l’inférieur, dont les lattes de bois ont été posées à la verticale. Les shutters intérieurs accentuent encore le côté linéaire de la construction. «Je tenais à ce côté dépouillé, note le propriétaire. Les deux cubes renforcent l’aspect contemporain de la façade. Quant au bois de cèdre, il ne nécessite aucun entretien. Tout au plus grisonnera-t-il légèrement avec le temps.»
La maison bénéficie, comme toutes les maisons Tom Wood, d’une isolation de pointe. Le propriétaire, qui avait investi dans les panneaux photovoltaïques dans l’une de ses précédentes demeures, n’a pas souhaité réitérer l’expérience. «Je revendais mon surplus d’électricité avec les certificats verts. Non seulement c’était compliqué, mais en plus, ce n’était financièrement pas intéressant par rapport à l’investissement consenti. A plus forte raison qu’au bout de dix ans, il est déjà temps de les remplacer.»
Cette maison est le parfait reflet de la passion d’un homme pour la décoration. Chaque objet, chaque matériau, chaque aménagement, est le fruit d’une longue expérience, d’une réflexion mûre et d’un goût sûr. Chaque chose a trouvé sa place, dans un style chaleureux n’hésitant pas à mixer mobilier ancien et industriel, avec une pointe d’exotisme.
Architecte : Coline Lescot
Date de construction : 2014-2015
Surface du terrain : 5 ares
Superficie : environ 275 m2 (dont 100 m2 de caves aménagées)
Pièces : 1 chambre, 1 salle de bains, un vestiaire, un vaste hall de nuit, une cave aménagée en galerie d’art…
Matériaux et techniques : système de chauffage par le sol fonctionnant au moyen d’une pompe à chaleur, citerne d’eau de pluie, béton lissé gris au sol au rez-de-chaussée, bambou au sol à l’étage, mortex dans la salle d’eau (murs et sol), béton peint en rouge au sol dans la cave aménagée, cuisine sur mesure en bois (réalisée par Marion de Doncker, menuisier), plans de travail et tablette en marbre, châssis en aluminium anthracite, shutters en bois blanc, parement extérieur en bois de cèdre avec bordure en zinc, toit plat en roofing.